Tribune libre d'Edwige Diaz, Membre du Bureau national du RN
Si l’épidémie de covid-19 est d’abord une crise sanitaire extrêmement grave, elle ne fait que précéder un choc économique qui s’annonce ravageur, si le Gouvernement continue de s’enliser dans son impasse.
Le 12 mars 2020, dans son allocution télévisée, Emmanuel Macron annonçait que tout serait « mis en œuvre pour protéger nos salariés et pour protéger nos entreprises quoi qu’il en coûte ».
À coups de grands renforts de communication, qui peinent à masquer la cacophonie gouvernementale, l’Etat annonce fièrement des mesures fortes en faveur des entreprises telles que l’activité partielle, l’instauration d’un « fonds de solidarité », le « Prêt Garanti par l’Etat » ou encore des reports de taxes.
Malheureusement, et comme c’est souvent le cas en Macronie, l’arbre cache la forêt....
Chômage partiel
Si les conditions d’éligibilité au chômage partiel ont enfin été élargies à des professions qui avaient été oubliées (assistantes maternelles, employés à domicile, VRP ...), qu’il a été confirmé que seraient pris en charge 100% du salaire pour les employés payés au smic et 70% du salaire brut pour les employés gagnant jusqu’à 4,5 fois le smic, il n’en demeure pas moins qu’à ce jour, aucun dispositif automatique et généralisé n’a été prévu pour permettre aux micro-entrepreneurs et aux travailleurs indépendants (commerçants, exploitants agricoles, professions libérales...) de percevoir une indemnité de subsistance.
Pire, alors que l’entreprise va subir une baisse immédiate de son chiffre d’affaires, il lui revient d’avancer le salaire de ses employés placés en activité partielle en attendant un remboursement, qui après étude et éventuelle autorisation de la Direccte, lui sera versé par l’Agence de Services et de Paiement (ASP) plusieurs semaines après. Par ailleurs, le Gouvernement passe sous silence que les charges salariales jusqu’à mi-mars sont dues à échéance par les entreprises et qu’elles ne font pas l’objet d’une mesure conciliante particulière.
De quoi affaiblir encore davantage des trésoreries !
« Fonds de solidarité »
Le gouvernement se gargarise d’accorder des primes de 1500€ par entreprise dans le cadre d’un « Fonds de solidarité ». Or, Les conditions d’éligibilité sont déraisonnablement restrictives.
Le décret indique que:
Pourquoi un calcul de CA mensuel établi sur 40 jours ? Une erreur se serait-elle malencontreusement infiltrée sur le site de la Direction Générale des Finances Publiques pourtant mis à jour le 30 mars ?
La réponse réside peut-être dans l’hypothèse suivante.
Avec un mois artificiellement allongé et une obligation de confinement à partir du 17 mars, soit avec une perte activité de 37,5% sur la période de référence (15 jours sur 40), comment peut-on perdre 70% de son CA?
Renvoyé à son cynisme, Bruno Le Maire, a annoncé, seulement le 31 mars, que la perte de CA pour bénéficier de ce « Fonds de solidarité » serait abaissée de 70% à 50%, a priori sur les périodes mars 2019/mars 2020. Quand bien même ! Est-ce qu’une aumône sauvera une entreprise ? Par cette décision, l’Etat considère sans doute que si une entreprise subit une baisse de 20, 30 ou 40 % , ce n’est pas si grave. Cette déconnexion de la réalité laisse perplexe !
De plus, seule l’éligibilité à ce « Fonds de solidarité » permettra aux entreprises en très grande difficulté d’accéder à une seconde aide de 2000€ versée, après étude au cas par cas des dossiers et sollicitable à partir du 15 avril, auprès des Conseils régionaux, en mal de décentralisation et de communication à 1 an des prochaines élections régionales.
Face à ces complexités et ces iniquités, Marine Le Pen propose une simplification et une mesure juste qui sera une vraie bouffée d’oxygène, immédiate et salvatrice pour les entreprises de moins de 1000 salariés : 1.500 euros plus 1.000 euros par salarié, reconductible chaque mois le temps que l’activité sera interrompue. Le remboursement des sommes pourra être étalé sur 10 ans.
Absence d’harmonisation
Par ailleurs, l’absence constatée d’harmonisation des modalités de report en fonction des organismes et des entreprises pose plusieurs problèmes. D’abord, elle désoriente encore davantage les chefs d’entreprise déjà légitimement inquiets pour l’avenir de leur entreprise. Puis, elle pénalise encore plus ceux qui rencontraient déjà des difficultés financières. Par exemple, un employeur ne pourra obtenir un délai de paiement pour régler la part patronale de sa dette sociale seulement s’il s’est préalablement mis à jour des ses cotisations. Mais quel entrepreneur sensé ne paye pas ses cotisations par plaisir ? On va mettre la tête sous l’eau à des entreprises qui buvaient déjà la tasse !
Si l’administration fiscale accorde des délais de paiement de 3 mois pour les impôts directs tels que les acomptes d’IS, de CFE ou encore de CVAE, elle n’a pas reçu l’ordre d’appliquer de report pour la TVA qui, par conséquent, reste due aux alentours du 21 de chaque mois sous peine de pénalités.
Quant aux éventuelles annulations d’impôts, la lourdeur administrative du dossier est telle qu’elle découragera inéluctablement nombre de potentiels ayants droit.
Contrôles fiscaux
Tous ces seuils, ces plafonds, ces déclarations, ces taux, ces reports, ces exonérations entraînent légitimement de la confusion. Et toutes les entreprises ne peuvent pas s’offrir les conseils réguliers de cabinets d’experts comptables pour monter les lourds dossiers. Naturellement, il y a consensus sur le fait que ces aides doivent être réservées aux entreprises qui font preuve de sincérité et qui sont vraiment dans le besoin. D’ailleurs, l’immense majorité des entrepreneurs est composée d’honnêtes gens. Par conséquent, les administrations, organismes et les médias avaient-ils vraiment besoin de brandir que les contrôles fiscaux, tant personnels que sur les sociétés et jusqu’à 4 ans après l’obtention des aides, seraient multipliés ? En agissant ainsi, ne paralyse-t-on pas des entreprises qui pourraient être éligibles aux dispositifs mais qui par manque d’accompagnement et appréhension des contrôles et des sanctions n’en font pas la demande ? Ne jette-t-on pas aussi la suspicion sur une catégorie de Français ? La loi pour un État au service d'une société de confiance d’août 2018, n’est-elle pas censée permettre de corriger ses erreurs ? Aujourd’hui, plus que jamais, les chefs d’entreprise n’ont pas besoin d’être stigmatisés. Ils ont besoin d’être soutenus !
Loyers
En ce qui concerne les reports de loyers, même si Bruno Le Maire se gargarise d’avoir signé un engagement avec « la plupart des bailleurs français » et même « des bailleurs privés », cela ne garantit pas une systématisation des reports de loyer.
Pour les entreprises éligibles, l’ordonnance du 25 mars 2020 relative au paiement des loyers indique qu’il est « interdit de faire application d’exécution de clause résolutoire » mais seulement durant la période d’urgence sanitaire.
Aussi, ces mesurettes relèvent plus de la communication que du traitement de fond du problème.
D’abord, en raison des conditions d’éligibilité parfois mal appréhendées, les entreprises françaises ne bénéficient pas d’une égalité de traitement. Les accords de report dépendent essentiellement du bon-vouloir des bailleurs.
Pire, alors que les bailleurs HLM bénéficient d’argent public, ils ne sont pas contraints d’accorder des délais de paiement aux entreprises pénalisées qui en feraient la demande. Qu’attend le Gouvernement pour légiférer ?
Ensuite, le report n’équivalant pas à exonération, pendant la crise ou à l’issue de la crise (pour les entreprises éligibles aux dispositifs de report), la société qui aura subi une perte d’exploitation se verra asphyxiée par une augmentation des charges fixes : loyer « habituel » + échelonnement des loyers reportés + taxe foncière du local + autres charges reportées... C’est à ce moment que risque d’apparaître la crise de solvabilité. Et si un bailleur décide de rompre un bail, l’entrepreneur perdra ce qu’il a bâti souvent au prix de sacrifices personnels immenses : son fond de commerce.
Enfin, nombre de bailleurs sont de petits propriétaires qui, grâce à ces loyers, constituent leur retraite. Cette interdépendance économique ne devrait pas permettre au Gouvernement de se défausser et d’inciter à la générosité... avec l’argent des autres.
Prime de 1000€
Toujours généreux avec l’argent des autres, le Gouvernement incite les entreprises à verser une prime de 1000€ aux salariés (ou de 2000€ d’après les annonces de Bruno Le Maire du 31 mars). Le Rassemblement National, viscéralement attaché au pouvoir d’achat des travailleurs, et notamment des plus modestes, déplore que le Gouvernement excelle dans l’art d’opposer les Français les uns aux autres : les employés bénéficiaires de la prime contre ceux qui ne le sont pas. Les patrons contre les salariés....
Si le Gouvernement autorise les entreprises qui le peuvent à verser une prime justifiée, défiscalisée et désocialisée par exemple aux caissières, les caissières des petits commerces de proximité mériteraient également cette prime de risque et de reconnaissance. La subtilité consiste à ne pas pénaliser l’entreprise surtout si elle est déjà en difficulté. Une solution pourrait donc se matérialiser par une exonération de charges salariales et patronales de manière à ce que le salaire brut de la caissière devienne finalement son net.
Prêt Garanti par l’Etat
Enfin, il existe le dispositif phare du Gouvernement, survendu par les médias : le PGE (Prêt Garanti par L’Etat) avec ses 300 milliards d’euros.
Ce qu’on murmure à peine du bout des lèvres c’est qu’il ne s’agit ni d’un prêt gratuit, ni automatique, ni plus facile à obtenir qu’un autre prêt. Il ne servira pas non plus à financer des investissements, qui seront probablement en berne en 2021, mais à assurer les besoins en fond de roulement des entreprises et ainsi, leur survie.
Il est commercialisé par les réseaux bancaires qui appliquent leurs propres sélections et conditions d’attribution. Il est de notoriété publique que les établissements bancaires restent frileux à accorder des prêts aux entreprises les plus en difficulté.
Quant aux 10% non garantis par l’Etat, les emprunteurs devront les garantir à titre personnel, comme par exemple en engageant leur patrimoine personnel. L’intégralité du prêt ainsi que les frais du taux fixe appliqués à la première année (0,25%) seront à rembourser en une fois à l’issue de la première année. Si l’emprunteur n’a pas d’autres options que de prolonger ce crédit de trésorerie en prêt amortissable jusqu’à cinq ans, il se verra appliquer un taux variable et augmenté. Au regard de la reprise économique très progressive qui suivra la crise, combien d’entreprises seront en capacité, au bout d’un an, avec une baisse importante de leur CA, de rembourser à la fois leurs charges fixes, de racheter du stock et de rembourser ce prêt ? Entre étude au cas par cas et affluence des demandes, la BPI risque d’être vite submergée et les délais de traitement vont s’allonger alors que les entreprises ont besoin de réactivité.
Marchés communaux
Dans un autre registre, mais qui s’inscrit tout autant dans la dichotomie entre les paroles et les actes, lundi 23 mars, le Premier ministre, a décidé d’interdire les marchés (couverts ou non) tout en autorisant une possibilité de dérogation aux maires. Les préfets seront chargés de vérifier si les mesures sanitaires sont respectées. Ici encore, la faiblesse du Gouvernement explose au grand jour: il fait reposer la responsabilité qu’implique le maintien d’un marché et les sanctions en cas d’éventuels manquements aux consignes sanitaires sur les communes. Et en même temps, il découvre et en appelle aux valeurs de bons sens : le patriotisme économique et le localisme.
En bref, il renvoie la « patate chaude » aux maires tout en se donnant bonne conscience !
Si les dérogations relatives aux ouvertures de marchés revêtent en effet une trop lourde responsabilité pour les communes, celles-ci peuvent néanmoins être solidaires des entreprises en les accompagnant concrètement : gel des droits de terrasse, exonération pendant 2 mois des loyers perçus par la commune, subventions exceptionnelles pour payer les loyers quant il s’agit de petits bailleurs privés...
Assurances
Enfin, les autres acteurs majeurs qui devraient prendre activement part à la solidarité nationale sont les assureurs.
Le gouvernement se félicite que ces créanciers du quotidien aient débloqué un fonds de 200 millions d’euros. Mais les parlementaires de la majorité, pourtant massivement interpellés par les entrepreneurs et leurs syndicats, n’ont vraisemblablement pas su se montrer convaincants. Ce qui permet aux assureurs de continuer à se retrancher derrière un flou sémantique que le Gouvernement refuse de dissiper et grâce auquel ils peuvent refuser de couvrir les pertes d’exploitation.
L’Etat doit être en mesure de déclarer l’état de catastrophe naturelle, ou, le cas échéant, de déclarer un état de catastrophe sanitaire et/ou épidémique entraînant les mêmes effets que celui de catastrophe naturelle.
Car cette absence de couverture de perte d’exploitation est lourde de conséquences : d’une part elle fait courir un sérieux risque de faillite à l’entreprise en raison d’une fragilisation de sa trésorerie. D’autre part, le bilan de l’entreprise subira une importante baisse de chiffre d’affaires et cette baisse sera responsable de la dépréciation de la valeur du fonds de commerce.
Cumulant cynisme et quasi-absence, les assurances, bénéficiant de la complaisance du gouvernement, sont insuffisamment présentes quant à l’impérieuse nécessité du redressement économique du pays. Il faut y remédier sans plus tarder !
Entre injonctions contradictoires : « Restez chez vous » / « Allez travailler », slogans mensongers « Zéro recette = zéro dépense » et impuissance consternante, le Gouvernement ajoute à la crise sanitaire, une crise économique et une crise de confiance.
Le Gouvernement a largement contribué à mettre l’économie du pays à genoux en raison de ses récentes décisions : entêtement à poursuivre la casse sociale, laxisme envers les casseurs infiltrés au sein des manifestations des Gilets Jaunes, grèves consécutives à la reforme des retraites.... Et maintenant, il adopte des postures altruistes, s’obstine dans des mesures comptables, s’embourbe dans ses contradictions, perd du temps et au final, n’apporte pas de solutions pérennes aux acteurs économiques nationaux !
Seuls un maintien, un soutien et une sécurisation du tissu économique permettront à la nation d’éviter une récession drastique et malheureusement durable.
Immédiatement, il faut automatiser, simplifier et accélérer les procédures tant de préservation que d’anti-faillite des entreprises.
Parallèlement, il est temps que nos dirigeants opèrent un séisme idéologique et appliquent la doctrine de bons sens défendue depuis longtemps par le Rassemblement National : colbertisme, souveraineté, relocalisations, reindustrialisation et localisme.