Notre souveraineté pharmaceutique est aussi un impératif

Mathilde Androuët

Communiqué

24 février 2020

Communiqué de presse de Mathilde Androuët, Député français au Parlement européen

La propagation de l'épidémie du coronavirus en Europe reste une préoccupation majeure à l'heure où le cap des 2.500 morts et 74.000 personnes infectées dans le monde a été officiellement dépassé. Onze communes du nord de l'Italie ont décrété une quarantaine suite au décès de quatre personnes et l'infection de 165 autres par le virus. Dans un entretien publié hier par le Parisien dimanche, le ministre de la Santé Olivier Véran a déclaré que le gouvernement se préparait à l'éventualité d'une épidémie sur notre sol, alors que la Commission européenne vient de débloquer10 millions d'euros pour la recherche d'un vaccin.

A cette occasion, Bruno Le Maire semble avoir découvert les dangers et les limites de la globalisation à tout crin. Vendredi, lors d'une réunion à Bercy, le ministre de l’Economie a ainsi déploré la trop grande « dépendance » d'un certain nombre de «chaînes de valeur» vis-à-vis «de leur approvisionnement à l’étranger». Un « problème stratégique» pour notre économie qui induit, a-t-il ajouté, le risque d'une pénurie de médicaments. Un rapport sur cette question devrait lui être remis «d’ici à quelques jours».

M. Le Maire ne peut taire en effet plus longtemps un état de fait exposé par les spécialistes et relayé par les ministres de la Santé de l'Union européenne : les fortes incertitudes sur la capacité à endiguer la progression du coronavirus à court terme font craindre que cette épidémie puisse impacter nos besoins en médicaments.

Car si gouverner c'est prévoir, ce gouvernement a encore une fois décidément tout faux. Mme Buzyn à qui M. Véran a succédé en avait déjà été avertie par l'Académie nationale de pharmacie qui le répète depuis de longues années : notre industrie de la santé est totalement dépendante de l'importation en médicaments et équipements en provenance d'Asie et notamment de Chine. Au vu de la situation actuelle, Joerg Wuttke, le président de Chambre de commerce de l'UE en Chine, a même évoqué le spectre d'un « cauchemar logistique ».

Cela est vrai pour notre pays, mais plus largement pour les autres membres de l'Union européenne. Nos voisins sont eux aussi potentiellement victimes sur le plan sanitaire de la logique mondialiste de délocalisations massives vers l'usine du monde chinoise et autres pays à faibles coûts de fabrication. Dans les faits, nos dirigeants ont laissé les géants de l'industrie du médicament, qui engrangent des profits colossaux, agir à leur guise, dans un domaine qui relève pourtant de la santé publique et de notre indépendance pharmaceutique. Résultat, 70% à 80% des substances actives entrant dans la composition des médicaments sont produites aujourd’hui en dehors de l'Union européenne, l'Inde et la Chine concentrant à elles deux 60% des sites, contre environ 20% il y a trente ans.

Dans ce monde toujours plus instable, il conviendrait de revenir à une saine logique de précaution. Il s'agit de réaffirmer, dans le cadre de l'Europe des nations que nous souhaitons voir en œuvre, la nécessité de faciliter la relocalisation sur notre sol des technologies les plus sensibles, notamment celles liées à la santé, à la production des matières premières pharmaceutiques.

Dans le domaine sanitaire comme dans beaucoup d'autres, notre vulnérabilité accrue prend sa source dans l'incapacité ou le refus des idéologues libéraux bruxellois à anticiper, mais aussi à penser en termes de préférence nationale et communautaire, gage de souveraineté et, ici, de sécurité sanitaire.

Mathilde Androuët

Communiqué

24 février 2020

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