Tribune libre de Christian Lechevalier, Ancien Élève de l’École Nationale Supérieure de Sécurité Sociale, Conseiller Régional de Bretagne
Le « régime universel » de retraite n’a pas été discuté par le Gouvernement Macron qui a préféré museler l’Assemblée Nationale au 49-3, malgré son énorme majorité !
Pourtant, alors que la France a mis 56 ans à s’inspirer des lois de Bismarck et Beveridge, alors que le système mis en place en octobre 1945 par les Ordonnances du Général de Gaulle fonctionne bien, depuis 75 ans, les Français pouvaient espérer mieux qu’une Commission Spéciale avortée et 13 petits jours de discussion pour tout jeter et partir En Marche arrière !…
Aujourd’hui, c’est au tour de la loi organique d’être occultée, malgré son importance extrême.
En effet, elle impose une prétendue « règle d’or » quinquennale à tous les rouages de la retraite.
Or, plutôt que d’une « règle d’or », c’est de potion acide qu’il faudrait parler, car il s’agit d’obtenir l’équilibre, exigé par Bruxelles, sans augmenter les prélèvements.
Pour ces derniers, il ne s’agit même plus de consacrer 14 % du PIB mais de descendre aux alentours de 12 %...
Qui peut penser que ce soit possible sans baisser les pensions ?
Ainsi, à l’heure où la « conférence de financement », désertée par les principaux syndicats, n’est plus qu’une pantomime, il ne s’agit pas d’ergoter sur les leurres agités par le gouvernement comme la « valeur du point » et autres billevesées.
En effet, la réalité, bien plus prosaïque, a été avouée, en pleine séance de l’Assemblée Nationale, par une députée de la majorité, Laurence VICHNIEVSKY :
« il faut se faire à l’idée de baisser les pensions… ».
Bel aveu !...
De fait, hommes et femmes perdront tous au nouveau système !
Mais comment pourrait-il en être autrement, dans un régime qui fait la moyenne de toute la carrière, au lieu des 25 meilleures années comme aujourd’hui ?
Exemples :
- Même après 46 ans de carrière, un homme entré par la petite porte à 18 ans pour finir cadre supérieur à 64 ans perdra plus de 35 % de pension !
Haro sur le mérite !
Haro sur l’ascenseur social !
- À l’autre extrémité du spectre, un autre homme, au terme d’une carrière minimaliste très plate, perdra près de 15% par rapport à aujourd’hui, à 64 ans, malgré 2 ans d’activité au-delà du prétendu « âge légal » maintenu…
En effet, plus aucune carrière n’échappe à la précarité ou au chômage, surtout en début d’activité, et souvent jusqu’à plus de 30 ans !!
Encore ces pourcentages tiennent-ils compte d’un partage de la bonification pour enfants avec l’épouse !
Car c’est un aspect méconnu du texte : déshabiller les retraités hommes pour faire semblant de donner aux femmes.
Comme si les salariés masculins étaient responsables du moindre niveau de pension des femmes !
Pourtant, si ces dernières doivent percevoir davantage, ça ne doit pas être au détriment des hommes qui, déjà, souffrent de la pire des inégalités : mourir plus jeune.
- Au reste, les femmes seront loin d’être mieux loties par le « système Macron » :
- Comme les hommes, elles devront travailler deux ans de plus pour ne pas subir de décote à 62 ans ;
- Deux ans de plus, encore, du fait de la suppression des bonifications de carrière pour enfants !
Le tout sans parler des réversions acquises bien plus tardivement et médiocrement qu’aujourd’hui !
Quant aux rares femmes partant à 62 ans en ne perdant « que » 12 %, elles ne seront « moins frappées » que les autres qu’en s’arrogeant la totalité de la bonification pour enfant, au détriment de leur conjoint !
Triste Macronie où on met à nu les hommes pour moins dévêtir les femmes, sans jamais solliciter les riches amis du président de la République…
On pourrait allonger à l’infini les scories tranchantes d’un texte bâclé, tailladé au fleuret non moucheté par le Conseil d’État.
On se contentera ici d’évoquer le chef d’œuvre de perfidie et de supercherie des « 1000 € » minimum brandis par LREM.
Tout d’abord, les baisses fantastiques évoquées ci-dessus conduiront des centaines de milliers de pensions à tomber, d’abord, sous les mille euros !
Ensuite, le mécanisme de rattrapage jusqu’à 1000 euros ne se fera qu’à condition d’aller jusqu’à l’âge-pivot, obligeant ainsi des personnes ayant cotisé longtemps, souvent, dans des emplois pénibles, à effectuer deux ans de plus qu’aujourd’hui pour échapper à la misère totale !
Toute cette apparente complexité est en réalité le fruit très simple d’une énorme régression : le passage à un système qui ne définit que les cotisations, en laissant au montant des retraites le rôle de variable d’ajustement.
Les Suédois, qui ont déjà subi des baisses, peuvent en témoigner !…
Le Rassemblement National dénonce ce principe « systémique » pervers.
Dans un monde bousculé par le « tout-marché », les hommes et les femmes ont au moins besoin de la certitude de leurs vieux jours.
Les Français ont droit à une retraite à prestations clairement définies : système offert en 1945 par le Général de Gaulle.