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L’obsession coloniale ne ferait-elle plus recette en Afrique ?

Dominique Bilde

Tribune libre

31 août 2020

Tribune de Dominique Bilde, député français au Parlement européen

Alors que de la France aux États-Unis, on vibre aux accents des slogans « décoloniaux», en Afrique, on n’a que faire de ces vieilles lunes occidentales !

Signe des temps, à l’heure où sur l’autre rive de l’océan ou de la Méditerranée, on déboulonne les statues, le Bénin préfère quant à lui donner une nouvelle vie à ses vestiges coloniaux. De même, le français ne fait plus figure de longue date de symbole honni du colonisateur. Renforcée par l’expansion sans précédent de l’éducation (la part des enfants scolarisés en primaire est passée de 55 % à 78 % en trente ans), la langue de Molière gagne du terrain et retrouve même ses lettres de noblesse parmi ceux qui la renièrent un temps, au premier chef desquels le Rwanda.

Rénover plutôt que détruire : tel est donc le mantra d’une Afrique francophone qui garde les yeux résolument braqués vers l’avenir.

Et les chiffres lui donnent raison. Sur ce point, aussi bien le très sérieux Centre d'étude et de réflexion sur le monde francophone (CERMF) que l’Agence française de développement (AFD) sont à l’unisson. Cette dernière, qui publie cette semaine son Atlas de l’Afrique, est formelle : le Sahel, systématiquement associé dans le discours public (non sans quelques raisons) au terrorisme islamiste, est en réalité la région d’Afrique mue par la croissance la plus dynamique, témoignant du succès de l’héritage transmis par la métropole.

Sentant le vent tourner, nombreux sont du reste les pays qui cherchent à y rafler la mise, de l’Italie, qui multiplie les représentations diplomatiques en passant par la Russie qui muscle ses échanges dans le domaine de la défense. Quant à la Chine, sa mainmise sur le continent n’est plus à démontrer : au Niger, d’aucuns dénoncent ainsi la main basse sur la manne pétrolière du pays, tandis que tant d’autres États font l’amère expérience du piège de la dette.

Notre conception systématiquement misérabiliste et victimaire de l’Afrique ne serait-elle donc qu’un avatar de plus d’une condescendance tout occidentale ? Alors qu’un nouveau chapitre de l’histoire du continent est en train de s’écrire, il ne tient en tout cas qu’à nous de ne pas rester sur le bord de la route.

 

Dominique Bilde

Tribune libre

31 août 2020

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