Tribune libre d’Aurélia Beigneux, Député français au Parlement européen, membre de la Commission environnement et de l’intergroupe relatif au bien-être animal
Le loup gris est un animal qui était autrefois présent sur l’ensemble du territoire. Il a malheureusement souffert de nombreux préjugés à son égard. On a longtemps pensé qu’il était un prédateur du bétail et de l’homme. Les superstitions et les croyances ont ensuite fini de sceller son sort. Des grandes battues du Moyen-âge à la loi du 3 aout 1882 ordonnant sa destruction, le loup disparaît du territoire en 1940. Il a ensuite été réintroduit naturellement en 1992. On estime aujourd’hui sa population à seulement 580 individus.
Comme un rappel de l’Histoire, un arrêté publié le 23 octobre dernier par le ministère de la Transition écologique et solidaire vient fixer à 19% le quota de loups dont la destruction est autorisée. S’il fallait enfoncer le clou, précisons que ce décret est reconductible. Depuis le 1er Janvier, 97 loups ont ainsi été tués.
Décrié par de nombreuses associations, ce décret montre à nouveau la déconnection entre l’exécutif et la réalité. Un décret pris, comme de nombreux autres, en totale contradiction avec les recommandations des experts et l’opinion des citoyens sur ce sujet.
Les attaques, en augmentation ces dernières années ont pourtant prouvé l’inefficacité des mesures de régulation. Les faits sont là : plus on le tue, plus le loup attaque. Cela s’explique par le fait que la meute affaiblie et privée de son mâle dominant se disperse et jette son dévolu sur des proies faciles, comme les troupeaux domestiques.
Il n’est pourtant pas interdit d’user de bon sens. En Italie par exemple, loups et éleveurs cohabitent sans heurts. En effet, la seule façon de dissuader
efficacement les loups de s’approcher des cheptels est de recourir à des moyens de protection efficaces, traditionnels mais aussi innovants.
Il ne faut cependant pas blâmer les éleveurs sans pointer le rôle de l’État. La France a été bien incapable de mener une politique incitative par le biais de mesures d’accompagnement. Si les équipements comme les flashs électriques, clôtures électrifiées et colliers répulsifs ont un coût, il est inconcevable que les éleveurs doivent les financer de leur propre poche, eux qui sont déjà fragilisés par la crise économique.
Officiellement la population de loups gris est en hausse. Toutefois, le rythme de progression de l’espèce ralenti de façon considérable si bien que l’on s’éloigne de plus en plus du seuil de viabilité fixé à 2500 individus.
Une fois encore, la Macronie a une vision purement technocratique du bien-être animal. Enfermée dans sa tour d’ivoire, hermétique au pays réel et pleine de certitudes, elle nous livre une décision froide et implacable, et tant pis si elle emporte le loup sur son sillage.