Coronavirus : pourquoi les Régions ne sont-elles pas en réalité, en mesure d’aider significativement les entreprises ?

Edwige Diaz

Tribune libre

21 avril 2020

Tribune libre d'Edwige Diaz, Membre du Bureau national du RN

Quand en seulement quatre semaines de crise nous déplorons autant d’entreprises en très grande difficulté, autant d’entreprises sollicitant un prêt pour soutenir leur trésorerie, via le Prêt Garanti par l’État, et autant de salariés relégués au chômage partiel, c’est que la crise économique n’est pas seulement conjoncturelle mais structurelle.

Le Coronavirus a été l’accélérateur et le révélateur de la crise, celui qui a rendu visible les carences et la fragilité structurelle de notre modèle économique et social.

Cette crise structurelle est le résultat de décennies d’ultra-libéralisme, d’innombrables traités de libre-échange, de soumission aux dogmes économiques de l’Union Européenne, de délocalisations, de concurrence internationale déloyale, de désindustrialisation...

Au milieu de cette jungle, force est de constater que les Régions ne disposent que de quelques moyens d’action très marginaux sur ces réalités.

Croire que les Régions aident significativement les entreprises relève de l’illusion. Les Présidents de régions assistent, quasi impuissants, au naufrage des entreprises dont ils sont indirectement responsables, car tous ont occupé des postes importants au sein des partis qui ont dirigé notre pays et l’ont mené dans l’impasse mortifère où nous nous trouvons.

Normes, contraintes, fiscalité étouffante, règlements et idéologies.... C’est donc piégés par l’étau dont ils ont été les architectes qu’ils vont péniblement tenter de dispenser sporadiquement quelques menues bouffées d’oxygène aux entreprises.

Prenons l’exemple de la Nouvelle-Aquitaine qui va consacrer 72 millions d’euros, sur son budget de 3 milliards, au « soutien » aux entreprises, via plusieurs dispositifs.

Faute de simplification et de guichet unique, certaines aides régionales sont corrélées à celles de l’État, quand d’autres s’appliquent lorsqu’une entreprise n’est pas éligible aux dispositifs étatiques.

Pourquoi l’exécutif n’a pas retenu la proposition de bon sens de Marine Le Pen ? Marine Le Pen souhaiterait que la Banque de France attribue directement dix milliards d’euros aux entreprises de moins de 1000 salariés. Ainsi, chaque entreprise bénéficierait, mensuellement et le temps de la crise, d’une aide forfaitaire de 1500 euros à laquelle s’ajouterait 1000 euros par salarié.

En outre, les entreprises les mieux accompagnées, grâce aux services d’experts comptables ou de services administratifs dédiés, auront peut-être la chance de faire partie du petit pourcentage d’entreprises qui bénéficieront d’un des dispositifs suivants.

D’abord, il existe le « Fonds de solidarité régionale » autrement appelé le « dispositif anti-faillite ». Ce fonds ne peut être accordé que dans un deuxième temps. Préalablement, les démarches auprès du fonds de soutien national doivent être engagées et jugées recevables.

Ce fonds s’élève à 20 millions d’euros répartis par aide forfaitaire de 2 000 euros. Cette répartition présuppose que le Conseil régional estime à seulement 10 000 (sur les 600 000 environ que compte la Région), le nombre d’entreprises qui vont être menacées de faillite en raison de la crise sanitaire. Soit moins de 2%. Utopique !

Ensuite, le « Fonds régional de soutien d’urgence aux entreprises » s’adresse aux entreprises de 5 à 250 salariés. Quinze millions d’euros vont être alloués sous la forme de subventions ou de prêts allant de 10 000 à 500 000 euros Ce sont donc seulement 1500 entreprises, au maximum, qui pourront être aidées. Une goutte d’eau.

Enfin, le dispositif s’adressant aux entreprises les plus touchées est le « Fonds de prêts de solidarité et de proximité pour les TPE » (commerçants, services, artisanats...).

Doté d’une enveloppe de 12 millions d’euros, ce fonds consentira des prêts aux entreprises concernées selon une clé de répartition oscillant entre 5 000 et 15 000 euros. Cela veut dire qu’au maximum, seulement 2 400 professionnels seront éligibles à ce prêt.

A titre d’indication, il existe environ 130 000 commerces en Région Nouvelle-Aquitaine. Rajoutons les services et l’artisanat et ce dispositif concernera moins de 1% des potentiels ayant droit du territoire.

Ainsi, pour tenir ce cadre financier, quand bien même ces fonds seraient sensiblement abondés, les exécutifs régionaux n’auront que deux alternatives : sous-communiquer, afin de diminuer au maximum le nombre d’ayants-droit de ces dispositifs, ou appliquer l’injuste principe du « 1er arrivé -1er servi ».

Quoiqu’il en soit, ces dépenses devront respecter les principes budgétaires des collectivités territoriales, à savoir, entre autres, l’équilibre et l’annualité.

Malgré de légères modifications de certaines mesures budgétaires (suspension du pacte de Cahors pour cette année et possibilité de réorienter une partie de la section d’investissement non dépensée vers les financements attribués aux entreprises), le compte n’y sera pas.

Englués dans leurs dogmes dispendieux (politique de la ville, immigration, « culture » contestable...), il est illusoire d’envisager que les exécutifs régionaux réalisent des économies dans ces domaines.

Bien que la France soit le pays le plus taxé de l’OCDE, augmenter les impôts semble être leur solution favorite, comme en témoigne le Président de la Nouvelle-Aquitaine qui propose la création d’une « taxe régionale écologique ».

Décidément leur obsession décentralisatrice et fédéraliste, accompagnée du sempiternel matraquage fiscal, les conduits à ne retenir aucun enseignement de la crise des Gilets Jaunes !

Un mot de l’après-crise.

Certains présidents d’exécutifs prônent un « pacte de relocalisation » ou « pass relocalisation ».

L’idée est louable. Diagnostiquer les entreprises stratégiques et industrielles susceptibles de se réinstaller en France et les accompagner, notamment par la voie de subventions, peut s’entendre.

Cependant, les mêmes causes produisant les mêmes effets, faute de compétitivité les entreprises françaises ne seront plus viables.

Elles fermeront ou elles délocaliseront de nouveau et la socialisation des efforts financiers aura été vaine.

C’est la raison pour laquelle il faut sérieusement envisager de conditionner l’attribution des subventions publiques à un engagement de non-délocalisation, ou, le cas échéant, à un remboursement de celles-ci.

Ces exigences ne pourront cependant donner leur plein effet que si elles s’accompagnent d’un gel de la fiscalité et d’un allègement des charges pesant sur nos entreprises.

En complément, afin de renforcer les entreprises françaises, il faut, dans un premier temps durant la période de crise, et définitivement à terme, adopter un assouplissement dérogatoire du code des marchés publics.

Cette mesure passe par :

• une simplification des dossiers d’appels d’offres.

• Un rehaussement des seuils à partir desquels les administrations publiques doivent recourir à un appel d’offres pour réaliser un achat.

• La démocratisation de l’allotissement.

• Un pourcentage d’attribution de la commande publique réservé aux PME.

• La non-pénalisation de la clause Molière.

• La suspension de la directive « détachement des travailleurs ».

• L’instauration d’une clause de priorité nationale.

C’est seulement grâce à ces mesures protectionnistes que nous pourrons réellement faire en sorte que l’argent public soutienne durablement et prioritairement les entreprises françaises et l’emploi des Français.

Dans l’immédiat, n’en déplaise aux exécutifs régionaux en mal de décentralisation, le sauvetage des entreprises ne passera pas par de sporadiques attributions de subventions, ni par des moratoires, pas plus qu’au recours à de nouveaux emprunts, fussent-ils à taux zéro ou à remboursement différé.

Ces prétendus « gestes de solidarité » n’auront pour effet que de retarder la crise de solvabilité des entreprises, et in fine, l’hécatombe économique du pays.

Avec un peu de recul, on s’aperçoit que les entrepreneurs ont besoin de trésorerie destinée à régler en priorité les charges sociales et fiscales de leur société qui s’opèrent la plupart du temps par prélèvement automatique.

Autrement dit, l’État et les Collectivités proposent des prêts pour assurer les propres recettes de l’État, au détriment de la viabilité des entreprises.

Si celles-ci disparaissent, ce sera autant de recettes fiscales en moins encaissables dans un avenir proche.

Cette gestion à la petite semaine n’est pas à la hauteur de la situation. Si les exécutifs régionaux voulaient vraiment aider les entreprises, ils plaideraient auprès du Gouvernement pour que celui-ci prenne de vraies mesures salvatrices pour l’économie, à savoir, une exonération totale des charges fiscales et sociales pendant la durée du confinement ou encore, une prise en charge par les assurances des pertes d’exploitation.

A terme, il faut que le bon sens l’emporte face à l’idéologie et aux marginales et éphémères « mesurettes » des exécutifs régionaux, dont le contenu s’apparente finalement plus à « des coups de com’ » et à des coups de menton qu’à de véritables mesures de soutien économique.

Le patriotisme économique, le protectionnisme intelligent, les circuits-courts, la relocalisation industrielle et le localisme doivent être les piliers de l’État stratège que le Rassemblement National appelle de ses vœux.

Edwige Diaz

Tribune libre

21 avril 2020

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