Excellence,
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs les membres de la représentation nationale
C’est pour moi un très grand plaisir et un immense honneur que d’avoir pu m’entretenir hier avec Son Excellence le Président Idriss Deby Itno, dans sa région natale, ce qui m’a permis de constater que l’hospitalité toute sahélienne des Tchadiens n’est pas une légende.
En acceptant ma visite, le Président Deby a brisé les barrières de l’ignorance et de la stigmatisation médiatique dont je fais l’objet, bien au-delà de la France.
C’est aussi un très grand honneur d’être ici devant vous aujourd’hui, car j’ai toujours été convaincue que seuls le dialogue et le contact directs peuvent autoriser à fonder un jugement ; à cet égard, je veux croire maintenant, après m’être entretenue avec le président de la République, que les relations franco-tchadiennes n’auront pas à souffrir de mon élection en mai prochain, bien au contraire et qu’une coopération verra le jour dans le cadre d’une politique de codéveloppement d’un nouveau type.
Son patriotisme et son aspiration à une totale souveraineté du Tchad et du peuple tchadien n’ont d’égaux que mon patriotisme et mon aspiration à une totale souveraineté de la France et du peuple français. A ce titre, nous parlons incontestablement la même langue !
Je n’oublie pas, et mes concitoyens non plus, ce que la France doit à quelques traits caractéristiques de votre nation : la générosité, la loyauté, la bravoure, l’honneur et la dignité …
Et un attachement viscéral à la liberté, celle qui naît de la fréquentation de si grands espaces.
Tout cela a permis et fondé l’exceptionnelle amitié franco-tchadienne, celle qu’André Malraux saluait à l’aube de votre indépendance, car : « C’est de N’Djamena qu’est partie l’épopée qui conduisit le général Leclerc à Strasbourg ; c’est ici que le gouverneur Eboué a uni la plus noble fidélité à la France à la plus lucide confiance dans les qualités africaines. »
Sans le Tchad comme premier territoire libéré, sans les Tchadiens au premier rang des Forces françaises libres, la France n’aurait pu figurer au rang des principaux vainqueurs de la Seconde guerre mondiale : cela ne doit pas s’oublier, et ne le sera pas.
Tout comme je veux croire que les Tchadiens n’oublieront pas que la France ne leur a ensuite jamais fait défaut dans les moments difficiles, quand la Libye occupait la bande d’Aozou, voire imposait par les armes son projet de fusion des deux pays.
Français et Tchadiens ont si souvent combattu côte à côte !
Et ils luttent encore ensemble aujourd’hui, au Mali, contre la barbarie djihadiste, pour la sauvegarde d’un État frère et, au-delà, la sécurité de toute l’Afrique et de l’Europe.
Permettez-moi donc de rendre un hommage solennel aux soldats tchadiens et français tombés au Sahel.
Merci donc, de me donner l’opportunité, ici, en terre africaine, de vous exposer les principes qui guideront l’action de la France non pas « en », mais « pour », et surtout « avec » l’Afrique, lorsque le peuple français m’aura accordé sa confiance.
Mon discours aujourd’hui devant vous est loin d’être, pour moi, un discours comme un autre.
Le thème des relations franco-africaines figure au cœur des attaques mensongères et grossières dont je suis la victime depuis des années : ainsi, je serais, dit-on « raciste, xénophobe, islamophobe ! », que sais-je encore ?
Le patriotisme en général, et le patriotisme français, en particulier est présenté par le système comme un « repli sur une France rance et nauséabonde, un abandon par la France de ses responsabilités internationales, le triomphe de l’égoïsme national sur la solidarité universelle ».
Autrement dit, et entre autres choses, à les écouter, mon arrivée au pouvoir signifierait l’abandon de l’Afrique et l’hostilité envers les Africains.
Bien sûr, je mets au défi qui que ce soit de pouvoir citer des propos que j’aurais tenus et qui accréditeraient cette accusation mais, pour le système en place dans mon pays, tous les moyens sont bons pour se maintenir.Il est plus que temps d’en finir avec ces mensonges !
J’ose ainsi espérer que ce discours restera comme « le discours de N’Djamena », celui qui aura exposé au grand jour l’hypocrisie des racistes qui m’accusent de l’être, mais également l’hypocrisie qui caractérise la politique africaine de la France depuis la fin de la Guerre froide.
Et rassurez-vous, j’ai bien conscience que la seconde hypocrisie est bien plus grave que la première !
Je veux donc vous tenir aujourd’hui un discours de vérité, dont j’espère qu’il sera entendu bien au-delà de votre pays.
Les vérités peuvent déplaire, elles n’en sont pas moins nécessaires en ce qu’elles permettent ensuite de construire sur le réel, et non sur des chimères.
Une première vérité à établir concerne les raisons qui peuvent sous-tendre les implications d’un pays comme la France sur un continent comme l’Afrique.
Soyons honnêtes : aucun État n’agit seulement par charité.
Au mieux, il s’agit de faire briller l’image du pays à l’international, ou celle du gouvernement au plan national : cela donne des actions de communication de court terme, qui changent rarement la donne dans le pays africain concerné, voire l’aggravent.
Et surtout, des ingérences étrangères pour apporter le développement économique ou résoudre des conflits locaux ...Le Tchad n’a pas besoin de cette charité condescendante.
A contrario, je rejette également les interprétations machiavéliennes des actions des grandes puissances en Afrique, celles qui voudraient que toutes leurs politiques soient fondées sur l’accaparement des richesses naturelles dont votre continent regorge.
C’est trop simpliste et, là encore, c’est faire bien peu de cas de la dignité des Africains.
Ce système de relations inégales a perduré après les indépendances des colonies françaises – il a été désigné ultérieurement par le terme de « Françafrique ».
Il ne s’agissait pas seulement, pour la France, de se préserver un accès privilégié aux ressources naturelles : la Françafrique visait aussi à maintenir le poids diplomatique de la France dans le contexte de la Guerre froide et, sur la fin malheureusement, à permettre à des personnalités privées ou à des réseaux de s’enrichir sur le dos des africains.
Si je veux que l’Afrique soit la première des priorités internationales de la France, ce n’est ni par charité, ni par cupidité.
C’est, tout simplement, parce que notre intérêt commun rencontre notre amitié réciproque.La France doit avoir une politique africaine et, au sein de celle-ci, des priorités et des alliances privilégiées avec ses amis historiques.
La combinaison à l’échelle du continent de vos réalités diverses, heureuses ou malheureuses, y compris au sein d’un même pays, dessine pour l’Afrique des perspectives idylliques ou dramatiques.
Votre continent est aujourd’hui peuplé de plus d’un milliard d’habitants ; il en comptera deux milliards en 2050.
Cette population future comprendra 400 millions de jeunes âgés de 15 à 24 ans.
Oui, ce nombre peut être un atout et une force, une grande force, avec ce que les démographes appellent le « dividende de la jeunesse », quand la part des actifs est bien supérieure à celle inactifs, constituant ainsi une source de création de richesses et d’économies sur les budgets sociaux.
Il s’agit là, pour le continent africain, d’une belle perspective, celle que nous souhaitons tous ardemment.
Pour autant, la vérité est que cette perspective ne se concrétisera que si ces jeunes parviennent à trouver toute leur place dans la société, avec un emploi décent qui leur permette de fonder une famille.
Dans le cas contraire ces jeunes seront frustrés et prêts à se lancer dans toutes les aventures y compris les plus dangereuses.
La colère de dizaines de millions de jeunes pourra être instrumentalisée par tous les entrepreneurs de haine, qu’ils cachent leur avidité derrière des étiquettes politiques ou religieuses.
Les États les plus fragiles pourraient tomber. Ils laisseront la place à des zones de non-droit d’où bandits, terroristes ou rebelles pourront se lancer à l’assaut d’autres États, et ainsi fragiliser le monde.
Et le Tchad est bien conscient de ce problème depuis le démantèlement de la Lybie.
Permettez-moi un développement à ce moment de mon propos : quelle terrible erreur que celle commise en Lybie !
Nous nous souvenons, nous, pourtant, des mises en garde du Président Deby.
Il disait alors : « cette intervention relève d’une décision hâtive qui peut avoir de lourdes conséquences en matière de déstabilisation régionale et de dissémination du terrorisme en Europe, en Méditerranée et en Afrique. »
Je partageais en tous points cette analyse.
Les faits nous donnent aujourd’hui raison, et l’aveuglement de certains dirigeants ou ex-dirigeants est inexcusable.
C’est bien là la perspective dramatique, celle d’un effet-domino qui verrait les trous noirs sécuritaires aspirer les États que l’on croyait pourtant sur la voie de l’émergence.
Pour ma part, je peux vous assurer que les perspectives d’évolution de l’Afrique mobilisent toute mon attention et que, présidente de la République française, j’en ferai ma priorité en politique extérieure.
Encore une fois, au-delà de notre amitié, il en va de l’intérêt supérieur de mon pays, du vôtre et nos deux continents.
Car, au niveau du détroit de Gibraltar, seuls 14 kilomètres de mer séparent nos deux continents : il est stupide de croire que ce qui affecte l’un n’affecte pas l’autre, tout comme ce qui profiterait à l’un ne profiterait pas à l’autre.
C’est bien la raison majeure du déploiement de l’opération Barkhane : détruire les terroristes incrustés dans les zones de non-droit du Sahara, pour qu’ils ne menacent pas les États amis de la France, mais aussi, au-delà, pour qu’ils ne puissent jamais frapper en France et, au-delà, nos amis européens.
Je parlais tout à l’heure du risque de voir une partie de la jeunesse céder aux sirènes de ceux qui souhaitent les embrigader dans leurs entreprises belliqueuses … mais, loin de tous rallier la violence armée, une partie de ces jeunes désœuvrés chercheront à partir, probablement vers l’Europe.
Même s’il ne s’agit que d’une minorité, ils seront des millions : vous savez comme moi que leur accueil est impossible et que nous ne pourrons accueillir toute la misère du monde.
L’Etat français n’en aura pas plus les moyens demain qu’il ne les a aujourd’hui et, surtout, les Français le refuseront.
S’il vous plaît, comprenez-moi, et comprenez les Français : le refus de l’immigration massive, ce n’est pas le rejet et la haine de l’autre, c’est tout le contraire !
C’est au contraire une gestion rigoureuse, partagée et équilibrée des flux migratoires entre nos deux continents.
L’enjeu pour la France est bien de pouvoir intégrer dignement des étrangers, comme elle l’a si bien fait pendant longtemps, et ne le fait plus depuis quarante ans.
Vous avez peut-être des amis et ou des parents en France, vous savez que la vie n’y est pas rose pour tous.
Pas à cause d’un supposé racisme stigmatisant qui serait le propre des Français !
A cause de politiciens cyniques qui ont parqué les travailleurs étrangers dans des ghettos et les y ont maintenus pour en faire une main d’œuvre à bas coût et une clientèle électorale !
Pis, ils les ont convaincus que la France était à l’origine de tous leurs malheurs et qu’ils devraient toujours préférer la culture de leurs parents à la culture du pays d’accueil.
Or, en général, la vocation d’un étranger installé durablement en France, quelle que soit son origine, est de devenir Français !
Je veux rendre de nouveau l’assimilation possible et, pour cela, l’Etat français devra s’occuper en priorité des étrangers déjà présents sur son sol.
Il ne pourra pas, en même temps, s’occuper de centaines de milliers de nouveaux arrivants, surtout au moment où mon pays vit une grave crise économique et sociale, marquée par un chômage de masse et un appauvrissement ininterrompu.
Cet intérêt supérieur de la France, il rencontre l’intérêt supérieur de vos États et de vos populations.
Car l’émigration est un drame.
Nous savons que certains financent le terrorisme en organisant ces filières de migration.
Nous savons les dangers que courent les migrants en traversant le Sahara, au risque d’y mourir, en stationnant en Libye, où ils sont exploités comme des esclaves, et en se jetant en Méditerranée, où tant d’entre eux se noient.
Pensons à ceux qui réussiront à arriver en Europe !
Ils y seront des déracinés, beaucoup y connaîtront une pauvreté dramatique et alors verront naître évidemment dans leur cœur une vive amertume.
Est-ce l’avenir que nous voulons pour la jeunesse d’Afrique ?
Évidemment non !
Et puis enfin, vous le savez aussi, ceux qui partent sont souvent dynamiques et audacieux : c’est la sève vitale de vos peuples qui s’échappe, alors que vous avez tant besoin d’eux pour relever les innombrables défis de l’avenir !
Nous avons donc tous ensemble, dès maintenant, la responsabilité de tout faire pour voir aboutir le cercle vertueux qui amènera deux milliards d’Africains à vivre de leur travail, selon leurs valeurs propres, leurs propres identités et leurs propres cultures sous la gouvernance d’États stables.
Nous le souhaitons pour les raisons déjà évoquées, mais aussi parce que l’émergence de l’Afrique, c’est l’assurance de voir pérennisées entre nous des relations d’échanges humains, culturels et commerciaux fondés sur un respect et un profit mutuels.
Imaginez l’influence qui serait la nôtre sur la scène internationale si, ensemble, nous étions assez forts pour porter une vision originale de l’Humanité, celle qui se fonde sur les valeurs de notre francophonie partagée ! Sur le respect entre les nations, sur la souveraineté de chacune d’entre elles, dans un monde multipolaire qui émerge sous nos yeux.
Ensemble, nous défendrons la diversité culturelle, mais la vraie diversité culturelle, celle qui fait la beauté et la richesse de l’Humanité, à partir de cultures autochtones ancrées chacune dans son terroir originel, enracinées dans ses cultures et traditions, qui dialoguent entre elles, sans disparaître dans un melting-pot mondialiste aux valeurs strictement matérialistes !
Les thuriféraires de la mondialisation libérale veulent nous faire croire que la libre circulation des cultures permet leur diffusion et leur épanouissement : elle n’est en réalité qu’un masque pour la libre circulation de l’argent, et n’aboutit qu’à la disparition des cultures qui, comme des fleurs, se fanent et meurent lorsqu’on les coupe de leurs racines.
Nous avons donc à faire face à d’immenses défis. Relevons-les ensemble, coopérons, dialoguons, échangeons, mais restons ce que nous sommes !
Je reste viscéralement française comme vous êtes viscéralement tchadiens ; je suis chez moi en Bretagne comme vous êtes chez vous à Berdoba…
Cela nous empêche-t-il de nous comprendre, de nous entendre ?
Bien sûr que non !
Au contraire, notre attachement à nos sols, nos cultures et nos valeurs respectifs nous rapproche bien plus qu’il ne nous éloigne, face à ceux qui souhaiteraient voir triompher une Humanité sans attaches ni âme, soumise aux seuls dieux de l’argent et de la consommation, dans un monde plat, uniformisé et donc stérile.
Nous avons, ensemble, une vision du monde à défendre.
La France compte pour cela sur ses amis d’Afrique francophone, et entend tout faire pour contribuer à leur prospérité et à leur sécurité.
Je veux vous dire maintenant comment j’entends renouveler le partenariat qui nous unit, en commençant d’abord par les principes qui doivent le sous-tendre.
Depuis plus de 25 ans des hypocrites nous trompent s’agissant de la politique africaine de la France : mettre à bas leur hypocrisie sera au cœur de la relation renouvelée de la France à l’Afrique.
Les États africains sont indépendants, le Tchad est indépendant et souverain !
Je veux être pour vous un partenaire, et un partenaire qui vous respecte.
Vous le savez, je me bats en Europe pour que la France restaure sa pleine indépendance et la souveraineté de son État et de son peuple.
Pourquoi en même temps, en Afrique, irais-je nier votre indépendance et votre souveraineté ?
La souveraineté qui est au cœur de mon projet pour la France, est également au cœur de ma vision des relations franco-africaines.
N’allez pas en conclure que je ne considère pas la démocratie et la défense des droits humains, notamment la défense des droits des femmes, comme absolument nécessaire, en Afrique comme partout ailleurs : elles le sont incontestablement.
Mais la France doit agir avec intelligence, retenue et ne pas pratiquer la politique des « deux poids deux mesures » avec quelquefois des interventions ou des actions inexplicables.
Quelle est la crédibilité de la diplomatie française quand elle fait pression pour que le chef d’État d’un pays faible applique strictement les règles démocratiques, et ne dit rien à celui d’un pays fort qui ne respecte rien ?
Quelle en est la motivation ?
Nous avons tant perdu en crédibilité ces dix dernières années, avec ce « deux poids, deux mesures » si injuste …
Encore une fois, finissons-en avec les postures hypocrites.
Au-delà de la diplomatie, ce principe, si ancien et pourtant tellement actuel, de respect des souverainetés nationales et régaliennes, je veux le décliner dans tous les domaines de la relation franco-africaine, y compris dans la coopération.
La coopération. C’est bien là le cœur du sujet. Je dis bien coopération, et pas aide au développement.
Parce que la coopération, pour moi, comprend l’aide au développement, mais également l’assistance dans les domaines régaliens déterminants que sont la défense et la sécurité.
Car si tout le monde répète à l’envi « pas de sécurité sans développement, ni de développement sans sécurité », je considère, moi, que la sécurisation des acteurs du développement est une condition première de leur action.
Surtout, les premiers acteurs du développement, ce ne sont pas les opérateurs étrangers, ce sont les petits agriculteurs, les petits éleveurs, les artisans et les commerçants qui, tous les jours, tentent de maintenir une vie économique dans des régions en proie à l’insécurité.
Permettons-leur de vivre, de travailler et de commercer en sécurité, vous verrez qu’un grand pas aura déjà été franchi.
Sur la coopération, donc, nous pouvons parler chiffres, mais je ne commencerai pas par là car, le plus important, c’est la qualité de la coopération et, encore une fois, les principes qui la guident.
En effet, bien des erreurs ont été commises depuis vingt ans, sur le fondement d’aveuglements idéologiques et, là aussi, il y a des vérités difficiles à entendre.
La politique de coopération doit être renouvelée et renforcée entre la France et ses partenaires africains.
Car les États africains ont été simplement abandonnés : l’aide au développement a drastiquement diminué, et ce qu’il en restait s’orientait d’abord vers les sociétés civiles, dont les actions étaient réputées plus lisibles.
Elle a aussi été conditionnée à de sévères cures d’amaigrissement des États.
Nous voyons aujourd’hui le résultat, dans beaucoup de pays : de la casse des systèmes scolaires et de santé, à l’abandon des agriculteurs, des privatisations volées et à la déliquescence des forces de défense et de sécurité.
Les administrations ont déserté des territoires entiers de certains pays, faute de moyens.
Elles y ont été remplacées par des acteurs aux intérêts plus particuliers : des seigneurs de guerre, des trafiquants, des extrémistes religieux… bref, ceux contre qui nos armées luttent ensemble, en ce moment même.
Au-delà de cette faute, bien d’autres erreurs ont été commises, en particulier par des responsables français soucieux avant tout de montrer qu’ils avaient rompu avec les méthodes du passé.
Alors bien sûr, officiellement, la France demeure le 4ème bailleur bilatéral mondial, avec 8,3 milliards d’euros en 2015.
Mais si vous saviez, si nous savions, ce que cache ce beau chiffre !
Quelles contorsions et manipulations statistiques permettent de l’atteindre, en additionnant des choses incomparables !
Il y a un fait aujourd’hui : si l’on retire les subsides français aux fonds multilatéraux, les investissements dans les régions d’Outre-Mer – comme si ce n’était pas la France – les frais des étudiants étrangers en France, etc, etc, l’aide française concrète, en dons, pour le Sahel, représente moins de 300 millions d’euros par an.
C’est aussi dérisoire qu’irresponsable…
Comment s’étonner ensuite que la France soit critiquée comme un acteur misant tout sur la sécurité au détriment du développement ?
Voilà, mes amis, où nous sommes tombés, pour notre honte et votre malheur …
Je m’engage donc solennellement, devant vous et ici, à mettre fin à ce triste déclin si, demain, les Français m’en donnent la possibilité.
Je m’engage, parce qu’il en va de notre prospérité comme de notre sécurité à tous, à consacrer, avant 2022, 0,7 % de la richesse française à la coopération avec l’Afrique.
Ce chiffre englobera aussi bien l’aide au développement que l’assistance sécuritaire.
En revanche, parce que c’est l’argent des contribuables français, nous veillerons à sa bonne utilisation, dans des contextes d’état de droit et de bonne gouvernance et de respect des individus.
Je m’engage à faire mettre en œuvre conjointement les projets de coopération par les États français et africains concernés, ces derniers étant les premiers responsables du développement et de la sécurisation de leurs territoires et de leurs populations, c’est-à-dire de la construction et de l’essor de leurs nations.
Je m’engage à ce que la coopération française se consacre en priorité à quatre thématiques majeures : les forces de défense et de sécurité, l’agriculture et les infrastructures, l’éducation et la santé.
Je me permettrai de vous remettre, à l’issue de cette intervention, notre programme global sur les futures relations que j’entends poursuivre avec nos amis et partenaires africains.
Voilà, monsieur Le Président, Mesdames et Messieurs, ce que je suis venue vous dire, au Président Deby et à vous, aujourd’hui, dans votre beau pays.
Je veux humblement espérer que mes propos auront permis de lever vos éventuelles inquiétudes, et au-delà, celles de tous les Africains, quant à ce que sera notre relation après mon élection.
Ne croyez pas les oiseaux de mauvais augure qui ne font, par leurs mensonges, que tenter de préserver leur rente en manipulant les Africains de France et les Français d’origine africaine.
A l’opposé de leurs visions clientélistes, je ne souhaite pour ma part que la vérité et la sincérité.
Je ne désire que le rassemblement et l’union, en France, de tous les Français quelle que soit leurs origines et, sur la scène internationale, des francophones du Nord comme du Sud.
J’espère sincèrement que ces quelques vérités, mes vérités, ne vous ont pas heurtés.
Je veux croire au contraire qu’elles peuvent fonder le socle d’une relation renouvelée, après trente ans d’hypocrisie, entre la France et ses amis africains.
J’en suis sûre : le meilleur est devant nous !
Travaillons ensemble, dans le respect et la confiance, à la construction d’un futur qui verra nos peuples vivre dignement chez eux, tout en s’ouvrant d’autant mieux les uns aux autres qu’ils sauront qui ils sont, d’où ils viennent, et où ils vont.
Une dernière fois, je remercie le Président Deby pour son accueil, je vous remercie vous toutes et tous ici et, surtout, je remercie le peuple tchadien pour ses engagements passés, présents et futurs au service de la sécurité internationale.
Je ne vous oublierai pas.
Vive l’amitié franco-tchadienne !
Vive le Tchad !
Vive la France !
Et vive l’Afrique !