Depuis plusieurs semaines la Martinique vit au rythme d’une crise sociale d’une exceptionnelle gravité, résultat d’un mélange d’incompétence et de désintérêt des pouvoirs publics à l’égard des problèmes de ce département. Le ras le bol de la population martiniquaise a fini par dégénérer, mettant à nu la réalité d’un État aussi incapable de maintenir l’ordre que d’assurer à ses citoyens un modèle économique performant, digne et équilibré.
Cela fait pourtant des années que Marine Le Pen et le Rassemblement national sonnent l’alarme. Quel budget familial peut supporter de payer un surcoût moyen de 40% sur les produits alimentaires par rapport au prix de vente dans l’Hexagone ? Quel consommateur peut consentir à voir ses achats en ligne grevés par le surcoût de l’octroi de mer ? Au total, de combien faut-il disposer à la Martinique pour arriver à la fin du mois sans être systématiquement dans le rouge à sa banque et sans sombrer dans la précarité ?
Cette inégalité avec l’hexagone est d’autant plus inacceptable qu’elle ne constitue en rien une découverte : L’INSEE calcule chaque année l’évolution des prix et des revenus en Martinique comme partout en France. Et elle en rend compte au gouvernement. L’Autorité de la concurrence a remis aussi deux rapports, en 2009 et en 2019, sur le coût de la vie dans les outremers. Face à cela, seules quelques dispositions, bien intentionnées mais sous-dimensionnées, ont été prises avec les lois Lurel et EROM de 2012 et 2017. Nous n’en sommes pas étonnés : cela fait des années que les outremers sont les parents pauvres de la République avec des gouvernements qui rivalisent d’ingéniosité dans l’art de contourner les vrais sujets.
Aujourd’hui, entre indignation légitime et violences subventionnées par les ingérences étrangères, la Martinique est en train de sombrer. C’est pourquoi le gouvernement doit s’attaquer aux véritables causes de la vie chère dans le département !
Va-t-il réduire les frais de fret et le recours trop fréquent à des grossistes importateurs qui renchérissent le coût total des distributeurs ?
Entend-il réintroduire un minimum de concurrence là où règnent oligopoles et situations de rente, c’est-à-dire le contraire d’une saine économie de marché assurant naturellement la protection des consommateurs par la diversité de l’offre ?
Pense-t-il s’attaquer à la réforme de l’octroi de mer, cette taxe protectionniste devenue inflationniste, en exonérant les produits français et de l’Union européenne, sans chercher à s’abriter derrière l’alibi bancal du financement des collectivités locales dont les pertes de recettes peuvent être compensées à l’euro près par la DGF de l’État ?
En un mot, le nouveau gouvernement compte-t-il prendre le taureau par les cornes, quitte à bousculer quelques intérêts particuliers et autres « droits acquis », ou limite-t-il ses ambitions à rejouer la scène éculée du pompier qui arrive quand la maison a brûlé ?