Les contre-vérités de France Soir

Rassemblement National

Communiqué

07 février 2019

Dans un article publié le 5 février sur son site internet, France soir estime que le communiqué du Rassemblement National sur le blocage allemand relatif au renouvellement de la licence d’exportation du missile Méteor pour l’Arabie relève de la désinformation (fake news en novlangue macronienne).

C’est pourtant bel et bien France soir qui, connaissant mal le sujet tant sur le plan politique que sur le plan industriel, assène contre-vérités sur contre-vérités. Le Rassemblement National estime donc de son devoir de rétablir les faits dans leur intégralité.

Premièrement, si MBDA se décrit comme une société européenne, la réalité est quelque peu différente : il s’agit d’une société où, par héritage, investissements et recrutements, la partie française pèse 45% des effectifs et une partie substantielle (que le RN ne dévoilera pas pour des raisons de confidentialité) de son chiffre d’affaires, prises de commandes et carnets de commandes est réalisée par sa filiale française, sans oublier que son Directeur Général est français depuis sa création (2002); l’actionnariat ne reflète donc pas le poids français au sein de cette belle entreprise dont l’axe est d’ailleurs plus franco-britannique qu’européen.

Deuxièmement, Berlin connaît très bien l’impact de ses décisions sur l’exportation, actuelle ou future, de matériels de guerre français. Le Rassemblement National rappelle à France Soir qu’à la suite d’une réunion qui s’est tenue fin septembre dernier à Paris entre responsables français et allemands à ce sujet, l’ambassadeur allemand à Paris, M. Nikolaus Meyer-Landrut transmettait à Berlin par télégramme diplomatique l’avertissement français : sans exportation, la coopération bilatérale est fortement menacée. La SPD, partenaire de l'actuelle coalition, est elle aussi parfaitement au courant : « Pour les projets en coopération, nous devons nous entendre avec la France sur des règles restrictives à l’exportation ; sinon, l’Allemagne ne pourra pas poursuivre les coopérations »[1] (Thomas Hitschler, porte-parole de la SPD sur les questions de défense). Berlin a été enfin prévenu par de nombreuses déclarations des plus hauts dirigeants français.

Citons la ministre de la défense, Mme Florence Parly, 8 février 2018, lors d’une audition à la Commission de la Défense de l’Assemblée Nationale: « Pour pouvoir avancer bien et de façon efficace dans la coopération industrielle franco-allemande, je pense qu’il faut aussi savoir se ménager des capacités d’exportation. Or, et c’est pour cela que je disais que votre question était difficile, nous nous interrogeons sur le contenu de l’accord de coalition qui est en cours d’adoption. Il semble en effet que les principes liés à l’exportation des matériels d’armement vont faire l’objet de règles, de contraintes, de garanties importantes. Et nous savons bien que si nous coopérons sur le plan industriel et que nous n’avons pas la possibilité de vendre ces équipements à d’autres, le modèle économique de ces coopérations ne pourra pas être assuré. C’est un problème que je qualifierais de politique, et qu’il va falloir régler si nous voulons continuer à aller de l’avant dans la coopération franco-allemande.”

Citons le Délégué Général à l’Armement, M. Jöel Barre, le 15 février 2018, devant la même commission : « En ce qui concerne les exportations, il est en effet fondamental, dès lors que nous voulons promouvoir la coopération européenne en matière de défense, que les règles d’exportation des différents partenaires soient harmonisées, pour ne pas dire identiques. Il est vrai que, sur ce point, nous pouvons avoir des inquiétudes lorsque nous lisons le contrat de la große Koalition que nos amis allemands sont en train de négocier. Il est donc fondamental que nous le clarifiions et que nous nous accordions sur les règles d’exportation, car ils veulent manifestement s’imposer des contraintes qui ne sont pas les nôtres. C’est un sujet-clé : on ne peut pas développer la coopération européenne si les différents pays n’ont pas des règles d’exportation homogènes”.

Berlin connaît donc très bien l’importance du sujet en France, comme il sait que l’exportation d’armement, prolongement de la diplomatie (contrairement à la définition allemande), pèse 30% du chiffre d’affaires de l’industrie française. Mme Merkel sait parfaitement aussi que la réputation de son pays est ruinée sur les marchés export en raison du manque de fiabilité et de prévisibilité de sa politique export, au point que certains industriels exigent des compensations financières à l’arrêt de certaines de ses ventes; et qu'elle ruine aussi par la contagion des "dépendances mutuelles"celle de ses partenaires industriels et politiques, dont la France.

TroisièmementFrance Soir parle bien légèrement lorsqu’il ose affirmer que la politique allemande ne lèse pas la souveraineté française : empêcher un allié politique qui est en même temps un partenaire industriel de vendre à un de ses clients, est pourtant une atteinte à sa liberté de commerce et donc à sa souveraineté qui est l’art de décider et d’agir seul selon ses intérêts. France soir devrait savoir également que ne pas livrer un matériel payé ruine la réputation d’un Etat qui apporte sa garantie et d’un industriel qui manque à sa parole bien contre son gré. La situation est tellement dommageable aux intérêts français que l’industrie française promeut désormais à l’étranger des produits dits « German free » pour ne pas perdre ses clients effrayés par la politique suicidaire allemande dans le domaine.

Quatrièmement, le Rassemblement National estime que Mme Merkel, en accord avec ses partenaires de la Coalition (CDUCSUSPD), mène une politique d’exportation d’armement égoïste, unilatérale et hypocrite.

Egoïste, car le gouvernement de Mme Merkel  défend ses propres intérêts en laissant plusieurs sociétés allemandes, dont Rheinmetall exporter en Arabie Saoudite à partir de ses filiales suisse, italienne et sud-africaine tout en freinant un missile européen destiné à un avion de chasse européen (dont Mme Merkel n’a jamais freiné l’exportation, soit dit au passage, en Arabie, au Koweït, à Oman) ;

Hypocrite, car, alors que le Méteor n’est pas un missile air-air destiné aux Typhoon et n’est aucunement destiné à tirer sur une foule au Yémen, Madame Merkel laisse Rheinmetall Denel Munition produire en Arabie saoudite dans son usine d’Al-Kharj des obus de mortiers de 60, 81 et 120mm et des obus de chars de 105 et 155mm, qui tous peuvent être utilisés (ou le sont déjà) contre les populations yéménites.

Unilatérale, car le gel de tout examen de nouvelle licence d’exportation vers l’Arabie, décidé après l’assassinat de M. Khashoggi, a été fait sans aucune considération de l’impact potentiel sur ses partenaires politiques et industriels ; cette situation n’est pas nouvelle : Mme Merkel avait déjà par le passé bloqué soit des projets de vente (hélicoptère Tigre à un pays export) soit des composants/sous-ensembles (châssis, postes de tir ; électronique de défense ; etc) allemands destinés à être intégrés à des produits français, exportés in fine vers l’étranger (Arabie, Qatar, notamment).

A chaque blocage, c’est la réputation de la France, sa garantie d’Etat et sa capacité à livrer qui est ainsi mise en danger par son allié politique prétendument le plus proche. A chaque blocage, c’est la réputation de l’industriel français qui est ainsi mise en doute. A chaque blocage, c’est enfin l’emploi qualifié et non délocalisable français qui est menacé. Disons-le tout net : c’est un scandale qui n’a que trop durer.

Au bilan, France soir assène des contre-vérités que le Rassemblement National au nom de la vérité, se devait de rétablir dans le détail. Déjà le 22 janvier 2018, Marine Le Pen prévenait que tant que cette question fondamentale de l’exportation d’armement – dont la dimension est tout autant industrielle que diplomatique – n’était pas réglée entre la France et l’Allemagne, la coopération bilatérale n’avait aucun sens et aucun avenir. Jusqu'à présent, elle n'a jamais été démentie. Le Rassemblement National prévient que la politique d’exportation allemande ne changera pas puisque sa version restrictive est inscrite dans le contrat de Coalition (page 148) lequel trace la feuille de route pour la 19ème législature. Les responsables français sont donc bien naïfs de croire que Mme Merkel modifiera le cours de sa politique pour favoriser l’industrie d’armement française : France soir est-il si naïf à son tour pour le croire ? Le Rassemblement National appelle donc à l’arrêt de toute coopération avec Berlin tant qu’un accord permettant de trouver un système de coordination entre Paris et Berlin sur l’exportation d’armement n’a pas été trouvé.

Au final, présent là où il aurait dû être absent (le soutien français à la revendication allemande d’un siège au Conseil de sécurité des Nations-Unies), et absent là où il aurait dû être présent (la coordination sur l’exportation d’armement), le traité d’Aix-la-Chapelle a totalement manqué son but. Comme France soir dans ses stériles attaques contre les analyses rigoureuses et prémonitrices du Rassemblement National.

[1] « Für die gemeinsamen Rüstungsprojekte müssen wir mit Frankreich restriktive Regeln für spätere Exporte vereinbaren. Sonst kann Deutschland in diese Kooperationen nicht einsteigen", Der Spiegel, 26 octobre 2018.

Rassemblement National

Communiqué

07 février 2019

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